Ceci n’est pas le résumé d’un livre, mais l’histoire d’un livre qui a mis de la magie dans ma vie

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Article rédigé par Gwenaëlle Rédactrice Web

Résumer un livre a toujours été une épreuve pour moi. Déjà à l’école c’était un exercice auquel je détestais me prêter. Pourtant, des livres j’en lisais… beaucoup ! Dans ma Bretagne profonde, sans télévision, par principe de mes parents, les livres étaient mes compagnons. Avec eux, je vivais des aventures palpitantes. Je découvrais mes propres émotions : l’impatience, voire la fébrilité de connaître la suite, la peur avec les romans de Stephen  King, les premiers émois de l’adolescence, le désir dû… au plaisir des mots. Je dévorais les livres, je les buvais même, tant je m’en délectais. Mais les résumer, non. Cela revenait à me mettre à nue, à exposer ce que je ressentais au plus profond de moi, à livrer mon intimité.

Parmi tous les livres que j’ai croisés, il en est un qui s’est toujours dérobé, soit à ma curiosité, soit à mes professeurs. Je ne l’ai découvert que très récemment, à l’âge de 44 ans, âge du décès de son auteur, Antoine de Saint-Exupéry. Vous l’aurez compris, ce livre c’est Le Petit Prince.

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Le Petit Prince –Antoine de Saint-Exupéry

Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry

Comme tout le monde, je connaissais dans les grandes lignes l’histoire du Petit Prince. Je savais qu’il y est question d’une rose et d’un renard à apprivoiser.  Mais c’était à peu près tout. Un jour que je rangeais la bibliothèque de mon école, je suis tombée sur un exemplaire en format poche. Et j’ai commencé à le lire… Je l’avoue, je n’ai jamais réussi à finir de ranger une bibliothèque, tellement il m’est difficile de résister à l’appel de la lecture ! C’est ainsi que j’ai appris qu’Antoine de Saint-Exupéry exerçait un métier sérieux. Il était aviateur et avait étudié la géographie. En effet, sa carrière de peintre s’était brusquement interrompue à l’âge de 6 ans après avoir réalisé, en tout et pour tout, deux dessins que les adultes n’avaient pas compris : un boa ouvert et un boa fermé.

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Les boas fermés

Un jour son avion était tombé en panne en plein désert. Il devait effectuer la réparation tout seul. Le lendemain matin, il fut réveillé par un drôle de petit bonhomme qui lui demanda de lui dessiner un mouton. Antoine fut bien embêté, car il ne savait pas vraiment dessiner. Or son visiteur était bien exigeant ; et Antoine avait surtout un avion à réparer. Mais Le Petit Prince allait l’entraîner dans son univers, lui rappelant l’enfant qu’il n’avait finalement jamais cessé d’être.

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– S’il vous plaît… dessine-moi un mouton…

Le Petit Prince ou le sérieux de l’enfance

Le Petit Prince ne s’intéresse qu’aux choses sérieuses, vraiment importantes, comme s’occuper de sa fleur par exemple. Les adultes qu’il a rencontrés lors de son périple jusqu’à la Terre n’ont pas d’occupations sérieuses; c’est peut-être votre cas… Ils sont buveur, roi, businessman ou allumeur de réverbères, mais ne s’inquiètent pas des graines de baobab, alors que c’est très important les graines de baobab.

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Le roi, le businessman, le buveur…

Savez-vous pourquoi il est si important de s’inquiéter des graines de baobab ou à quoi le businessman occupe ses journées ? Non ? Alors ouvrez le livre et redécouvrez l’enfant qui sommeille encore en vous.

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Le vaniteux, l’allumeur de réverbère, les baobabs… et la rose

Comment j’ai fait découvrir Le Petit Prince à mes enfants et mes élèves

Ne pouvant garder le plaisir de la lecture de ce livre pour moi toute seule, j’ai voulu le partager avec mes enfants et mes élèves, afin qu’ils ne passent pas, comme ce fut mon cas, bêtement à côté de ce petit chef d’œuvre.

Le Petit Prince ou la magie du RER B en fin de semaine

Régulièrement, le vendredi soir, je dois traverser Paris dans le RER B en compagnie de mes enfants. Le trajet dure près d’une demi-heure, et pour certains usagers de ce transport en commun francilien c’est juste une horreur. Les rames sont bondées, tout le monde est fatigué de sa journée de travail, voire de sa semaine. Pour rendre l’affaire plus agréable, j’ai pris l’habitude de glisser un livre dans mon sac et d’en faire la lecture à haute voix à mes filles. L’avantage de se déplacer avec des petits, c’est que les gens nous laissent volontiers une place assise. Blotties contre moi, mes filles écoutent attentivement les histoires lues. D’ordinaire, les gens sont plutôt indifférents. Mais quand j’ai lu Le Petit Prince, les oreilles se sont tendues, des sourires se sont affichés sur les visages tirés. Le temps d’un voyage, les travailleurs, des gens sérieux, se sont détendus, se souvenant sûrement de leur enfance, et ont partagé ce moment, hors du temps, avec nous. Ce fut un instant magique !

Le Petit Prince à Saint-Denis

Je suis maîtresse d’école en Seine-Saint-Denis, le 9-3, comme aiment à l’appeler certains. Ce département est souvent décrit de manière très péjorative, en particulier par les médias. J’y travaille depuis une vingtaine d’années, et je n’y ai quasiment que de très bons souvenirs.

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Le Petit Prince et les roses

La première fois que j’ai lu Le Petit Prince à des élèves, j’enseignais au Franc-Moisin, l’un des quartiers les plus défavorisés de Saint-Denis, mais sûrement l’un de ceux où les gens ont un cœur grand comme ça et où le mot solidarité a encore du sens. C’était à l’occasion de la Quinzaine des Arts, organisée par l’école. Chaque enseignant devait proposer un thème. Les classes étaient éclatées, les élèves devant choisir l’un des thèmes. Je me retrouvai donc avec des enfants de tout âge, du CP au CM2. J’avais bien évidemment décidé de faire illustrer le livre d’Antoine de Saint-Exupéry par les élèves. Je ne voulais pas qu’ils se contentent de le lire, d’autant que certains étaient encore novices en la matière. Je voulais qu’ils s’imprègnent de la poésie du texte et qu’ils la vivent, qu’ils la fassent vivre. C’est ainsi que je leur ai lu moi-même l’histoire, chapitre par chapitre, tout en mettant à leur disposition de quoi les illustrer : de la peinture, bien sûr, mais également du carton, du papier crépon, des bouchons, du tissu, de la pâte à modeler, etc. Au fur et à mesure des besoins, les élèves ont eux-mêmes proposé d’apporter du coton pour les moutons, d’aller cueillir dans le jardin de l’école des graminées, jaunies par les fortes chaleurs de ce mois de juin, pour symboliser les champs de blé ou ont accepté de donner l’une de leurs cartes « Lapins crétins » pour illustrer le « vaniteux ». Pendant deux semaines, nous avons vécu l’école autrement. La quinzaine s’est terminée par une très belle exposition, dont l’ensemble des élèves pouvait être très fier.

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Le Petit Prince et le renard

Vous l’aurez compris, les illustrations de cet article, sont les œuvres de mes élèves. Quand je vous dis que le 9-3 est merveilleux et que Le Petit Prince est un livre plein de magie, vous me croyez maintenant ?

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